Les songes de Claudio

[Claudio]

Claudio était allongé dans la plaine fertile où paissaient les minotaures. Il les regardait se battre. De temps en temps, il ne dédaignait pas se mesurer en joute contre eux, mais pour l'heure ses pensées étaient ailleurs. S'en y prendre garde, il en vint à s'assoupir et rejoindre les bras de Dame Morphée.
Pour lui, Morphée prenait l'apparence du visage tant aimé, ce qui rendait son sommeil bien plus agréable encore.

Vers elle, il voguait sur un nuage de bonheur
Vers elle, il barrait la destinée de leurs coeurs réunis
Vers elle, il retrouvait son âme soeur
Vers elle, il apportait sa vie
Vers elle, il appelait son amour infini
Vers elle, il comblait l'éloignement forcé
Vers elle, il envoyait ses plus tendres baisers
Vers elle, à jamais son coeur appartiendrait.

Dans le ciel pur s'envolait les rêves et promesses d'une personne revêtant des couleurs immaculées. La glace perdait de son éclat lorsqu'elle le croisait. Une aura de bonheur simple émanait de ses songes impalpables.

Elle, la nymphe gracile aux formes souples
Elle, celle qui élancé tendait vers lui
Elle, avec qui il aurait formé un couple
Elle, avec son corps de femme inouï
Elle, celle qu'il avait toujours aimée
Elle, qui tendrement l'avait possédé.

Son étoile qui brillait loin de lui, mais proche de son coeur. Avec la sûreté du débutant, il rejoignait les horizons insoupçonnés de la grâce et la beauté. Son but ne s'en éloignait jamais. Toujours pour et par elle, ils rapellaient à travers eux une tendre personne.

A elle, il aurait pu lui parler des heures ou simplement se laisser aller à la regarder vivre. Voir son sourire s'épanouir à la vue d'une rose fraîchement cueillie. La sentir au parfum qui flottait dans les prés fleuris. La goûter entre les mets les plus délicats pour lui offrir la caresse du vent. La regarder s'envoler sous les plaisirs de la vie. Ses yeux détaillant le moindre souffle, le plus petit battement de son coeur, recueillant entre ses mains ce qu'elle laissait échapper. D'entre les flots tumultueux, à la recherche de l'île perdue, dans l'Eden des rêves, il ressortait les images, les souvenirs tant de fois vécus.

A chaque fois, il ne pouvait s'empêcher de souligner ce qu'elle était. Mais un à un les faits, les histoires s'égrennaient coulant limpides, le portant le long du cours du temps. Ici et là, il stoppait prenant quelque repos avant de reprendre sa route. L'un d'eux fut peu de temps après son départ, à l'aube de leur rencontre. Il se revoyait. Il les revoyait. Tous un à un et lui parmi eux, presque semblable à eux tous.
Trois sortaient du lot. Lui, un ami, un autre. Chassé-croisé pour elle, tendres secrets, ruptures, pleurs, séparations, traque, recherchers, ...
Deux restèrent. Le choix. Dur et implacable. La renonciation, par amour, volontaire. Depuis quel chemin...
Incorrigible et fier de l'être, il attendait. Comme il avait naguère promis. Il ne renonçait pas, son coeur ne l'avait jamais voulu.
Et la route repris. Une autre étape. Leur premier contact. La fortune qui souriait tantôt à l'un de ses amants, tantôt à l'autre. Mais à elle, y pensaient-ils ? Entêtés dans leur quête, y songeaient-ils ?
En revivant les scènes, il ne savait y répondre.

Qu'à jamais, tu reçoives ma reconnaissance
Pour l'amour que l'on a partagé
Qui fut pour moi une seconde naissance
Qu'à jamais tu saches à quel point je t'ai aimé.

Mélangeant passé, présent, futur, il quitta le fleuve tranquille du temps pour la rivière agitée. Il se laissa empoter par les actions incessantes de la houle, suivant les ressacs, subissant le courroux des éléments gréés par l'écoulement du grand sablier.
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Là où est le vent.